Pour découvrir Cenves en images, cliquer ici
Cenves en images, c'est ici

Vieux-Château, un hameau de Cenves

VIEUX-CHÂTEAU

On ne connait pas toujours l’histoire des hameaux de Cenves, celle de Vieux-Château est particulièrement intéressante. Le texte ci-dessous est tiré du livre « Cenves, un site, une histoire, un art de vivre ».

Le paradoxe de Vieux-Château

L’église et la cure

En général, lorsqu’on désigne une chose comme vieille, on la déprécie. Ici, au contraire, vieux serait synonyme d’ancien, ce qui serait merveilleux pour un château. Mais de celui-ci, pas de trace. En effet, il n’y eut jamais de château au hameau de Vieux-Château !
Une des explications résiderait dans le fait que le terme « Château » ne signifie pas obligatoirement une construction à usage défensif, mais peut venir de « castagna » signifiant châtaignier ou « Castagnos », nom propre gaulois. De même, le mot « vieux » ne signifie pas obligatoirement ancien dans la désignation des noms de lieux. Le toponyme Vieux-Château, dérivé de via chateu pourrait désigner une localité située sur une voie, à l’extrémité de la commune et sur un cours d’eau.
Le terme de château pourrait également faire référence à l’existence dans ce lieu d’un pied-à-terre des seigneurs de Pierreclos, avant la révolution. Lorsqu’ils venaient chasser dans la forêt de Cenves qui leur appartenait, ces derniers logeaient dans un ensemble important de bâtiments qui comprenait une vaste maison bourgeoise, dont une partie a subsisté jusqu’en 1960 et servait de presbytère. Les seigneurs de Pierreclos faisaient célébrer la messe dans une chapelle. Cet ancien édifice fut érigé en 1837, mais peut-être y avait-il antérieurement un oratoire à cet emplacement.
On imagine aisément l’arrivée de ces messieurs de Berzé, puis de Rochebaron et enfin Michon, en grand arroi, dans les quelques bâtiments situés à Vieux-Château : les meutes de chiens aboyant à qui mieux mieux, corrigés au fouet par les piqueux, les nombreux domestiques déchargeant les victuailles empilées sur les charrettes, les invités tous plus chamarrés les uns que les autres et, au milieu, le seigneur essayant de mettre un peu d’ordre dans tout cela.
Mais, à la guerre comme à la guerre, chacun s’empilait, soit à cinq ou six dans le grand lit d’une chambre, soit sur un matelas dans une soupente, soit tout simplement sur une couche de genêts ou de noisetiers dans la salle commune au coin de la cheminée. Le lendemain, à l’aurore, la messe entendue et après s’être copieusement restauré, tout ce beau monde montait à cheval pour partir à la chasse, les marmitons restant seuls maîtres des lieux afin de préparer le repas du soir.
Les bâtiments qui servaient de pied-à-terre aux seigneurs, prirent, de ce fait, le nom de château, et cette partie du hameau des Coraillers celui de Vieux-Château.

 

L’ancienne chapelle, avec ses fenêtres romanes, était jolie, mais pas assez spacieuse pour servir d’église paroissiale. Après la construction de l’église actuelle, en 1877, elle fut vendue à un particulier puis transformée en maison d’habitation. Honorine Gonon, qui l’habita jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale y accueillit un temps la cantine de l’école. Quant à la cure, les fenêtres à meneaux du bâtiment témoignaient bien de son ancienneté qui remontait vraisemblablement au XVe ou XVIe siècle. Après avoir servi de pied-à-terre aux seigneurs de Pierreclos pour leurs parties de chasse dans la forêt de Cenves, une partie des bâtiments fut transformée en ferme. L’autre partie dédiée aux habitations fut conservée comme telle, mais plusieurs annexes et dépendances en tout genre furent construites et au début du XXe siècle, on dénombrait près de vingt-quatre pièces différentes. Les propriétaires s’étant réservé la plus belle partie, côté route, ornée de boiseries dans les pièces principales, le reste fut loué à différentes personnes. Après 1900, ces bâtiments abritèrent même une épicerie tenue par Claudine Mansiat. Lorsque la paroisse de Vieux-Château fut créée et gérée et par l’Union Syndicale, l’abbé s’installa dans l’ancienne cure et enseigna le catéchisme dans une des belles pièces du rez-de-chaussée. Le dernier prêtre, l’abbé Giraud, était très bon jardinier, il profitait des nombreux noyers et élevait quelques poules et lapins pour arrondir ses maigres revenus. Il décéda dans cette cure en 1934. Finalement, la cure fut démolie, les divers bâtiments vendus ou loués et enfin transférés à la commune en même temps que l’église en 2000.

La paroisse de Vieux-Château

La commune de Cenves est très étendue (2 648 hectares) et il faut se replacer dans les conditions de vie du XIXe siècle. Jusqu’alors, la paroisse de Cenves était peu peuplée, 87 feux en 1671, avec des habitants qui avaient bien du mal à survivre aux famines, épidémies de choléra ou de peste, hordes de soldats démobilisés à l’issue des guerres, etc.

Vers 1860, la population dépassa pourtant les 1 500 habitants. Mais les communications restaient extrêmement difficiles, les chemins mal aisés et la neige bloquait les échanges une partie de l’hiver. Seuls les bœufs et les chevaux permettaient d’effectuer quelques charrois.
Vieux-Château se situait à une dizaine de kilomètres du bourg de Cenves avec des dénivelés passant de 350 à 650 mètres d’altitude, le point le plus élevé atteignant 736 mètres. Or, à cette époque, les transports mécaniques n’existaient pas. C’est donc tout naturellement que Vieux-Château privilégia les échanges commerciaux en direction du marché de Pierreclos, même de Mâcon et plus tard avec la gare de Saint-Sorlin, ancien nom de La Roche Vineuse.

Vers 1870, avec son moulin, ses deux cafés-restaurants dont l’un faisait aussi le commerce de grains, son épicerie et ses différents artisans, Vieux-Château comptait davantage de commerces que le bourg. Les habitants de Vieux-Château et vingt-trois hameaux représentant presque la moitié de la paroisse songèrent alors à la division en deux parties de la paroisse existante.
En 1875, était créée une Union Syndicale en vue de construire une église et d’aménager une école. Dans une pétition datée du 25 septembre 1876, les habitants de Vieux-Château firent état « des obstacles graves en tout temps et en hiver, ce qui expose leur santé pour remplir leur devoir religieux et donner une instruction civile à leurs enfants. »
Ce projet ne fut bien évidemment pas bien accueilli par les habitants du bourg et des autres hameaux, avec à leur tête le Maire Benoît Gonon, un homme au fort caractère.
Mais les habitants de Vieux-Château firent preuve d’une farouche détermination. Faute d’une majorité au conseil municipal, ils s’adressèrent directement aux autorités civiles et religieuses, préfet, Conseil général, archevêque, passant outre aux règles administratives.

L’Union Syndicale obtint ainsi plusieurs délibérations du conseil municipal et arracha successivement, entre 1876 et 1885, la création d’une paroisse, un cimetière (1880), un monument aux morts, une section de vote (25 juillet 1882, mais supprimée en 1979), une école (1885) et la pose d’une boite aux lettres ! Mais tout ceci ne se fit pas sans mal…

En 1875, n’obtenant aucun crédit pour la construction de leur église, les habitants de Vieux-Château organisèrent une souscription.
Jean-Pierre Dupont qui habitait Le Closat écrivit à l’archevêque de Lyon pour demander la nomination d’un prêtre pour la chapelle de Vieux-Château.
Un des importants propriétaires à Vieux-Château, Jean Gonon, bien qu’habitant Mâcon, céda un ensemble de bâtiments d’une valeur de 10 000 francs. Ce don permit à l’Union Syndicale de débloquer des fonds suffisants pour entretenir un prêtre et un instituteur.
En 1875, l’entrepreneur Gory d’Ouroux entama la construction de l’église de Vieux-Château aidé de tous les habitants qui servaient de main-d’œuvre bénévole pour les travaux de maçonnerie, transport et chargement des matériaux. Cependant, l’église construite en 1877 ne figura pas immédiatement sur l’ordo du diocèse. C’est pourquoi, en réaction, le 21 octobre 1878, une pétition fut envoyée au préfet pour demander l’ajournement de la construction de l’église du bourg jusqu’à la reconnaissance de Vieux-Château comme paroisse. Ils estimaient « injuste de contribuer aux charges d’une église du bourg qui leur était complètement étrangère alors qu’ils avaient construit sur leur fonds propre celle de Vieux-Château. »
Par ailleurs, la section de Vieux-Château représentait 485 habitants, celle du bourg 632 et les hameaux des Jonnets et des Grosliers que se disputaient les deux sections représentaient 68 habitants.

La Création de la subdivision

Le 12 février 1880, la majorité du conseil municipal (Pierre Thillet, Maire) acceptait la création de la paroisse à condition que les hameaux des Jonnets et des Grosliers soient rattachés à la section du bourg. Ce qui suscita la colère indignée des habitants de ces deux hameaux qui adressèrent une pétition au préfet « contre la section du bourg usant de sa force numérique, contrairement à leur désir de rester attachés à Vieux-Château »
Le 4 juillet 1880, un sous-seing était signé par messieurs Gonon et Bouchacourt permettant l’acquisition par l’Union Syndicale d’un terrain pour le cimetière.
La section de vote fut créée le 25 juillet 1882 (Benoît Gonon, Maire), mais avec la même répartition territoriale que pour la paroisse.
Le 10 juillet 1885, les habitants de Vieux-Château, grâce à une nouvelle souscription en argent et travaux manuels, purent construire leur école. C’est Étienne Rollet, maçon à Cenves, qui en eut la charge avec l’aide de tous les habitants qui ne ménagèrent pas leur peine.
En 1893, la paroisse fut enfin reconnue comme telle, mais cette même année, les habitants adressèrent une requête au préfet pour la création d’une nouvelle commune, en des termes qui illustrent bien la gravité de leurs ressentiments :
« sept conseillers sur douze sont du bourg. Cette majorité accapare les fonds pour les utiliser parfois de façon abusive.
Nous reprochons à la municipalité le coût exorbitant de l’église, 51 000 francs, contre 7 000 francs celle de Vieux-Château ; la création de la route du Vieux-Château à Saint Mamert (actuelle D 23) en refusant une liaison avec Tramayes. »
Ils concluent :
« La partition de la commune est le seul vrai remède à la division du conseil municipal et à l’hostilité des habitants. »

Une grave escarmouche, en 1895, témoigne une fois encore de l’intensité durable des rancunes : à la suite d’une nouvelle demande directe de subventions de l’Union Syndicale au Conseil général pour la construction du mur du cimetière, le Maire, Joseph Lardet et ses trois conseillers « firent défaut » avant délibération du conseil. Les autres conseillers, sur réquisition, rédigèrent le procès-verbal autorisant la demande de subventions, sans la signature du Maire.

Après les élections de 1896, la majorité fut acquise pour Vieux-Château. Monsieur Grivot, trésorier du conseil de Fabrique de la paroisse du bourg, qui sollicitait une subvention de Monsieur Vermorel, un industriel de Villefranche, pour l’achèvement de la tombe du curé Primpier qui avait laissé un souvenir durable aux paroissiens, s’exprima en ces termes :
« Ce qui était prévu est arrivé : le Maire est d’en bas… Si nous n’avions précipité le transfert, nous étions obligés de la mettre au cimetière neuf. Ils (ceux du Vieux-Château) nous auraient bien donné pour finir le monument du bourg, mais je pense qu’ils auraient demandé une compensation. Il aurait été triste de partager les restes de ce saint homme entre des mains étrangères ! »

En 1903, l’église fut reconnue comme succursale.

Toutes ces querelles peuvent paraître un peu folkloriques, mais il convient de les replacer dans le contexte de l’époque et elles témoignent de la foi et de la détermination de nos ancêtres pour, comme ils le disaient, « remplir leur devoir religieux et donner une instruction civile à nos enfants ».

 

Bien des changements sont intervenus. Les moyens de transport ont considérablement évolué, les transports individuels se sont généralisés, les transports scolaires se sont développés et la démographie en fut bouleversée.
L’Union Syndicale, transformée en Société Civile Immobilière, en 1963, continua à gérer différents biens comme l’église, des habitations et des terrains agricoles.
L’école fusionna avec celle du bourg en 1972 et s’associa avec celle de Serrières en 1987 pour former un regroupement pédagogique intercommunale (RPI).
La section de vote fut supprimée en 1979.
L’église de Vieux-Château fut rénovée en 1992.
En octobre 2000, suite à la dissolution de la Société Civile Immobilière qui n’avait plus de moyens financiers pour l’entretien des biens, les membres : Jacques Besson, Jean Ducroux, Michel Gardette, René Juillard (des Haires) et René Juillard (de Vers-le-Bois), ont décidé de remettre le patrimoine immobilier et foncier à la commune. Ils ont également adressé des chèques substantiels répartis entre les diverses associations du village ainsi qu’à la commune et au C.C.A.S.

Vieux Château, l’ancien moulin
La Petite Grosne

En 1830, il était petit et très éloigné du chemin qui monte au Closat, ce qui indique qu’il fut ensuite considérablement agrandi jusqu’au bord de ce chemin. Puis, dans les années 1950, la partie ancienne brûla ainsi qu’une partie de la nouvelle construction. Ne fut finalement réparée que la petite partie actuelle située le long du chemin du Closat. En même temps, disparaissait un autre petit bâtiment situé à la queue du bief et qui contenait la roue du moulin.

L’église

L’église construite en 1877 par l’entrepreneur Gory d’Ouroux, aidé par les habitants de Vieux-Château, pour remplacer l’ancienne chapelle trop petite, coûta 7 000 francs. Elle fut édifiée au-dessus du terrain où était implanté le pied-à-terre des seigneurs de Pierreclos et dédiée à Saint Jean l’évangéliste en hommage au bienfaiteur qui permit sa construction, Jean Gonon.
Les vitraux, qui ne sont plus visibles aujourd’hui, provenaient de l’église de la Rédemption à Lyon, mais les ouvertures de cette dernière étant plus larges que celles de Vieux-Château, les meneaux durent être partagés et répartis dans l’église. C’est ainsi que l’on trouvait, au fond du cœur, un vitrail représentant le Christ ressuscité montrant ses plaies à Saint Thomas, alors que la partie représentant Saint Thomas se situait sur l’un des vitraux de la nef. De même, sur un vitrail du côté droit de la nef, on pouvait voir la Samaritaine puisant de l’eau, mais il manquait le Christ qui se trouvait un peu plus loin dans la nef.
Ces vitraux avaient été donnés par le premier prêtre de la paroisse, père Dailler, né à Cenves.
L’église bénie le 12 mai 1877 n’apparut sur l’ordo qu’en 1893 et ne fut reconnue succursale qu’en 1903.
En 1987, pour son centième anniversaire, l’archevêque de Lyon, Monseigneur Renard, est venu célébrer une messe en l’église de Vieux-Château.

ITV René Juillard


(Le hameau Vieux-Château en discorde avec le bourg)

« Dans les années 20, il y avait un moulin, deux cafés-restaurants dont l’un faisait également le commerce de grains et une laiterie-fromagerie, établissement de la société Bel de Lons-le-Saunier qui fabriquait des fromages de la marque « Vieux-Château ». Pour utiliser le petit lait ainsi produit, un élevage de cochons était installé aux Coraillers. Il y aurait eu aussi une menuiserie, un forgeron et une scierie près du ruisseau. Les moyens de locomotion étant limités, l’artisanat se développait sur place. Une salle de bal fut créée le long de la route principale. Les fêtes qui y étaient données étaient très réputées et attiraient beaucoup de monde. Que d’activité tous les jours de la semaine et que de musique, de danse et de jeux les dimanches et jours fériés ! Vieux-Château était alors un centre d’activité qui bourdonnait du matin au soir. À cette époque, Vieux-Château était plus commerçant que le bourg de Cenves. D’ailleurs, entre 1870 et 1970, nous comptions le même nombre d’habitants, environ 600, et Vieux-Château réclamait son indépendance. Il existait une telle discorde entre les deux que l’église de Vieux-Château fut construite par ses habitants. Le monument était donc privé et géré par une Société Civile Immobilière, La Fabrique, dont j’ai été le président et trésorier pendant 35 ans. Le problème, c’est qu’il fallait l’entretenir et pour y parvenir, nous avons dû vendre une maison. Enfin, les rancœurs étant passées, vers les années 2000, nous en avons fait don à la commune. De même, jusqu’en 1972, nous avions une école indépendante de celle de Cenves, qui accueillait une trentaine d’élèves. Les gens restaient au pays en ce temps-là ! »

Le curé Primpier

Le prêtre Étienne Primpier, né le 14 février 1792 et décédé le 3 septembre 1845 à Cenves, officia sur la commune de 1819 à 1845.
Dans la chapelle droite de l’église, un ex-voto de cinquante centimètres sur trente, en caractères noirs sur fond blanc, porte l’inscription : « En reconnaissance au vénéré curé Primpier pour une guérison obtenue ».
« Pierre-Marie Gonon, père adoptif de ma cousine Jeanne Gonon, m’avait expliqué qu’atteint de la fièvre typhoïde, il avait été guéri, en un temps où cette maladie était le plus souvent mortelle, à la suite de prières au saint curé. Après sa guérison, il lui était resté des cheveux blancs alors qu’il n’avait que 40 ans, ce qui lui avait valu le surnom de Le Blanc » souvenir d’André Burel.
Un autre témoignage fait mention de sa capacité à aider les enfants en retard pour marcher. Ainsi plusieurs petits Cenvards auraient fait leurs premiers pas sur la tombe du curé Primpier.

Eglise: Une statue

Sur un manuscrit datant de 1899, on peut lire l’épitaphe qui fut gravée sur la sépulture du prêtre, avant que son corps ne soit transféré dans l’église :
« Sépulture de M. Primpier, curé vénéré de ses paroissiens pour sa grande charité et ses sentiments vertueux. Agenouillez-vous chrétiens et priez sur cette tombe le Saint qui repose sous cette pierre et transmettez votre prière au Seigneur, le Seigneur étant [illisible]. Je suis sûr de son éternelle miséricorde due à leur vénéré pasteur ;
Les habitants de Cenves 1899.
Ci-gît : Et. Primpier, né le 14 février 1792, décédé le 3 septembre 1845, père des pauvres, il fut plein de zèle et sacrifia sa vie pour le salut des âmes ;
Les fidèles de Cenves. »